Ateliers

Appel de textes – « Éthiques et politiques du trauma, de la résilience et de la réparation »

(The English version is here.)

Les Ateliers de l’éthique / The Ethics Forum
Appel de textes

Éthiques et politiques du trauma, de la résilience et de la réparation
Dossier spécial sous la direction de Sophie Bourgault (U d’Ottawa) et Éléonore Paré (U d’Ottawa et U de Picardie J-V)

Si le discours de la résilience est l’objet de critiques sévères au sein de la philosophie politique et des sciences sociales depuis plusieurs années (Walker et Cooper 2011; Carton 2013; Chandler and Reid 2016; Bracke 2016), la résilience demeure centrale comme forme d’adaptation et source de solidarité au sein de certaines communautés marginalisées (Herman 1997; Solnit 2010; Weaver 2023). La résilience a certes pu être cooptée par des discours néolibéraux, mais pour plusieurs chercheurs et chercheuses en psychiatrie et en psychologie critiques, elle est parfois envisagée comme un acte de résistance en soi—notamment dans certains contextes coloniaux où la survie est mise à l’épreuve quotidiennement, ou au sein de communautés ciblées par des crimes haineux (Jabr 2019; Malatino 2019; Seechi & Seechi 2021). Ainsi, dépendamment du contexte nécessitant la résilience (déracinement, migration, colonialisme, précarité, traumatisme, etc.), celle-ci ne serait pas nécessairement une acceptation ‘docile’ de la souffrance, mais pourrait, lorsqu’appuyée sur des réseaux d’aide, former la base d’une survie résistante ou servir de moteur de transformation sociale (voir par ex., Simich & Andermann 2014; Ionescu 2013; Hall & Lamont 2013).

Invoquer le concept de résilience implique ainsi de réfléchir simultanément le travail silencieux de violences à l’endroit de certains groupes et de questionner les moyens utilisés pour coopter et/ou invisibiliser les formes de survies et de résistances de ces mêmes groupes. Étudier la résilience nécessite de réfléchir en parallèle certains vécus traumatiques et d’oppressions dites ‘ordinaires’, ainsi que les conditions politiques, sociales et économiques qui rendent cette même résilience possible ou non (Fassin et Rechtman 2009; Alexander 2012; Hamrouni et Milot 2022; Pain 2022). Tout comme la résilience, l’évocation du trauma comme diagnostic et comme vécu a des implications éthico-politiques : l’usage du diagnostic de trauma aurait notamment une dimension utilitariste alors que cette catégorie peut être mobilisée pour avoir accès à certains droits, ou à des réparations (Fassin et Rechtman 2009, 10). Mais si le diagnostic de trauma peut servir à la visibilisation de certaines expériences de la violence et/ou de l’oppression, il n’est pas toujours gage de crédibilisation de ces expériences. L’économie morale du trauma est complexe, tout comme celle de la résilience et celle de la réparation.

Le présent appel de textes tentera de répondre à la liste (non-exhaustive) de questions suivantes :

  • Quelles sont les différences entre les conceptions cliniques/psychologiques et les conceptions philosophiques (philosophie, phénoménologie, pensée politique) de la résilience? Que peut-on tirer d’une perspective croisée entre ces conceptions et diverses disciplines?
  • D’une perspective historique et/ou politique, comment les théories féministes et décoloniales ont-elles façonné de nouvelles définitions de la résilience à l’oppression et/ou au trauma collectif? Dans quelle mesure les études sur le handicap et les études trans permettent-elles de comprendre le trauma et la résilience autrement? Quel est l’apport des ‘disaster studies’ pour l’étude de la résilience et de la réparation en philosophie politique? 
  • Comment éviter les processus de cooptation des termes ‘trauma’, ‘résilience’ et ‘réparation’? 
  • Quels rôles pour les arts, le théâtre et la littérature dans les processus de réparation et de guérison?  Comment penser les liens entre trauma et mémoire? Et l’intersection entre soin et réparation? 
  • Quelles sont les dispositions collectives nécessaires pour une résilience face à des désastres (écologiques, sanitaires, économiques) ou à des traumas collectifs? Quels moyens institutionnels et infrastructurels sont nécessaires pour faire face à « l’invivable » et/ou pour pallier des formes de vulnérabilités se renforçant dans le temps (Butler & Worms 2021)?
  • Dans quelle mesure le concept de résilience ou celui de trauma subissent-t-il les transformations de contextes sociaux, politiques et culturels?
  • Est-il approprié de qualifier notre ère de ‘culture du trauma’? Quelles sont les implications éthiques et politiques d’une telle qualification? 

Ce numéro multidisciplinaire aimerait réunir les travaux de chercheurs provenant de la philosophie, des sciences politiques, de l’éthique, de la sociologie, des études de genre, de la littérature, de la psychologie et de tout autre domaine pertinent. 

Date de soumission des propositions : 1er mars 2025

Les soumissions peuvent être en anglais ou en français. Les propositions doivent être d’une longueur maximale de 350 mots (excluant la bibliographie) et inclure un titre provisoire. Les auteur.ices seront contactés avant le 31 mars pour leur indiquer si leur proposition est retenue.  

Date de soumission des articles : 1er octobre 2025

Les articles peuvent être en anglais ou en français, et doivent être d’environ 6000 à 8000 mots. 

Soumission des propositions:  sbourgau@uottawa.ca et epare032@uottawa.ca

Veuillez suivre les directives de soumission des Ateliers de l’éthique/The Ethics Forum disponibles ici : https://www.lecre.umontreal.ca/wp-content/uploads/2014/07/consignes-aux-auteurs-2014_mise-en-page-1.pdf

Pour toute question, vous pouvez contacter Sophie Bourgault (sbourgau@uottawa.ca) ou Éléonore Paré (epare032@uottawa.ca