Société de philosophie du Québec

Appel à communications: Rapports de la philosophie de l’environnement à l’expertise et à l’expérimentation

Le 2 novembre dernier, le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) publiait la synthèse de son 5ème rapport. Le GIEC réaffirmait alors l’influence majeure de certaines activités humaines sur le changement climatique planétaire. En termes de politique environnementale, cette synthèse, comme ses versions précédentes, possède une importance cruciale puisqu’elle constitue le matériel scientifique de référence aux
()discussions et accords internationaux sur le changement climatique. La légitimité de l’expertise du GIEC dépasse ainsi la seule question épistémique. Elle soulève le problème plus général des limites éthiques et politiques de l’expertise et de l’expérimentation portées par la démarche scientifique.

En éthique environnementale, la Land ethic d’Aldo Leopold (1949) représente l’un des points d’ancrage historique d’une ouverture de l’éthique aux sciences de la biologie et de l’écologie. Puis, à partir de la fin des années 1960, le développement du biocentrisme, de l’écocentrisme et du mouvement de la Deep ecology renforce l’idée que la biologie et l’écologie doivent participer à notre compréhension du statut éthique des organismes ; des
espèces biologiques ; des communautés biotiques et des écosystèmes. Face à cette union idéale, le rapport de l’éthique environnementale à l’expertise, et à l’expérience de manière générale, n’est pas sans poser plusieurs problèmes.

En première lieu, l’écoféminisme, à travers ses divers courants, remet en cause la portée éthique d’une expertise fondée sur un paradigme scientifique rationaliste et dualiste, en partie responsable des dégradations environnementales actuelles. Suivant cette approche, une éthique environnementale devrait-elle se reporter vers une approche panpsychiste, comme le suggère Val Plumwood (1993) par exemple ? Ou bien, le cadre
théorique de l’expertise scientifique peut-il être repensé de telle sorte qu’il autorise la considération d’autres formes de connaissances (notamment traditionnelles) comme étant « expertes » ?

Un autre problème majeur, devenu classique et récurrent en éthique environnementale, s’en suit, et auquel il semble essentiel de pouvoir répondre à savoir l’accusation de naturalistic fallacy (Moore, 1903). Autrement dit, comment une éthique environnementale peut-elle intégrer un certain degré d’expérience empirique sans être tenue coupable d’établir ce qui doit être à partir de ce qui est ? Dans quelle mesure les normes guidant la conservation et la restauration environnementale peuvent-elles s’ancrer dans les modèles et les découvertes de la science écologique ?

Enfin, les positions pragmatiques de Bryan Norton (2005) et de Ben Minteer (2011) soulèvent la possibilité de mettre en place une politique de l’environnement, où la seule connaissance de l’écologie et de nos intérêts individuels et collectifs à l’égard de la nature permettrait de dépasser les divergences théoriques des différentes éthiques environnementales ; et de nous unir derrière des consensus pratiques. En d’autres termes, l’éthique de l’environnement possède-t-elle une place aux côtés de l’expertise et des processus de décision politiques ?

Si vous souhaitez participer à cette réflexion, vous êtes invité-e-s à envoyer un résumé de votre communication (1500 caractères maximum) avant le 6 décembre 2014 aux responsables de ce symposium : sophia.rousseau-mermans@umontreal.ca et antoine.corriveau-dussault@umontreal.ca.