Dave Anctil

Postes occupés

2007-2008 Chercheur-se postdoctoral-e,

Biographie

J’ai soutenu une thèse de doctorat en philosophie politique intitulée : La République à l’épreuve de l’Empire : liberté politique et démocratisation de la res militaris de Machiavel à Rousseau. J’ai fait mes études doctorales sous la direction de Christian Nadeau (Université de Montréal) et de Jean-Fabien Spitz (Sorbonne-Panthéon). Mes intérêts de recherche portent autant sur l’histoire des idées politiques modernes que sur la théorie politique contemporaine. Je m’intéresse en particulier aux liens historiques et théoriques, souvent paradoxaux, qui relient le phénomène de la violence à la citoyenneté et aux institutions démocratiques (citoyenneté, constitutionnalisme, etc.).

Ma thèse de doctorat cherchait à expliquer pourquoi le républicanisme fut l’idéologie prégnante des révolutions démocratiques modernes. J’ai effectué une étude à la fois contextualiste et comparatiste d’auteurs politiques majeurs et mineurs à trois « moments » historiques transitoires cruciaux : (i.) « Le moment d’Aristote », de la deuxième moitié de 4e siècle avant J.-C. jusqu’au début de notre ère, où commence à décliner en Grèce et en Italie l’à¢ge classique de la démocratie et des Cités-États; (ii.) « Le moment de Machiavel », à la fin du 15e siècle, où l’autonomie des républiques italiennes décline à la faveur de l’expansion des grandes monarchies territoriales; (iii.) Le « moment de Rousseau », enfin, placé au coeur de ce 18e siècle où les États monarchiques souverains s’étendent et se consolident en un système interétatique de l’équilibre des puissances, système officiellement reconnu dans les principes de la paix de Westphalie en1648.

La contribution philosophique oubliée du républicanisme que j’ai essayé de restituer est d’avoir montré que le dilemme sécuritaire est à l’origine du dilemme démocratique, puisque la sécurité collective pousse la puissance publique à instrumentaliser les choix collectifs des citoyens et à remplacer la solidarité civique par la contrainte étatique. J’ai montré pourquoi l’accroissement des capacités militaires des États modernes oblige les unités politiques rivales à prendre de l’expansion, ce qui revient à miner le fonctionnement égalitariste, intégrateur et mobilisateur des institutions civiques et explique l’échec récurrent des petites républiques de l’Antiquité et de la Renaissance. À l’inverse, des philosophes et historiens républicains comme Aristote, Polybe, Bruni, Machiavel, Montesquieu, Mably et Rousseau ont soutenu que la petite taille géographique et démographique des États agissait sur la manière de mettre en forme, sur le plan constitutionnel, l’équilibre des contraintes réciproques qui permet de protéger les citoyens contre les capacités monopolistiques inclinant le gouvernement vers l’impérialisme et le despotisme étatique. J’ai ainsi soutenu que l’héritage républicain nous permettait de mieux comprendre pourquoi le dilemme sécuritaire a historiquement bloqué la démocratisation des sociétés politiques, mais qu’à l’inverse une démocratisation des États est aussi susceptible de diminuer l’impact du dilemme sécuritaire sur le fonctionnement des institutions démocratiques.

Dans la foulée de ces recherches en thèse et de mes publications sur la théorie républicaine du gouvernement, mes recherches actuelles se tournent vers l’évaluation de l’impact du dilemme sécuritaire en regard de l’évolution des institutions démocratiques contemporaines. Ma perspective s’inscrit d’emblée dans celle des travaux de Philip Pettit, qui ont permis en outre de souligner l’importance de l’enjeu de la domination pour comprendre et instituer les moyens nécessaires à la constitution de la liberté des citoyens par des mécanismes institutionnels et démocratiques perfectibles de contre-pouvoir. Pour ce qui est de la question du dilemme sécuritaire, l’avantage premier de la perspective néo-républicaine est de considérer que l’État, même s’il est l’instance légitimement reconnue de la protection des citoyens, puisse aussi représenter un danger substantiel de domination : la menace principale de l’imperium étatique est la possibilité permanente d’une instrumentalisation des intérêts des citoyens de manière arbitraire, notamment par la manipulation de leur sentiment d’insécurité de la part des gouvernements et de certains groupes d’intérêts. Une des manières de protéger les citoyens des effets délétères du dilemme sécuritaire – et donc de minimiser le risque d’une course vers l’abîme sécuritariste – serait de tabler non seulement sur l’information objective des risques, mais aussi sur les capacités de régulation intégrées « naturellement » dans les mécanismes d’interaction sociale. Dans ce registre, mon hypothèse est que l’objectif des politiques publiques de sécurité devrait se justifier rationnellement dans sa capacité à combattre la peur ressentie par les citoyens. Je voudrais examiner cette hypothèse à la lumière des travaux contemporains en éthique (conséquentialisme), en théorie de la démocratie ainsi que dans les études de sociologie.

Quelques publications pendant ou avant mes recherches au CRÉUM:

Livres:
(à paraître) : Anctil, D., D. Robichaud & P. Turmel (dir.), Penser les institutions. Une introduction aux défis contemporains de la philosophie politique, 2008.
(à paraître) : Anctil, D. & B. Dubreuil, Idéologies et régimes politiques modernes, Montréal, Presses du CEC, 2008.

Articles:
(coécrit avec B. Dubreuil), « La reconnaissance est-elle praticable ? L’exemple du nationalisme », Temps philosophique, parution prévue pour février 2008.
« La liberté par l’événement. Essai sur la place d’Hannah Arendt dans la constellation républicaine », KLESIS – Revue philosophique, no. 2, 2006.
« Giovanni Botero : de la prudence politique à la raison d’État », Comètes, Revue des Littératures d’Ancien Régime, no. 3, 2006.
« Petite nation et républicanisme. Du multiculturalisme à l’autogouvernement », Horizons Philosophiques, vol. 13, no. 2, printemps 2003.

Chapitres de livre:
(coécrit avec B. Dubreuil) « La politique démocratique d’une société des identités : pour une « défragmentation intellectuelle » », dans J. Beauchemin et M. Bock-Côté (dir.), La Cité identitaire, Montréal, Presses de l’Université du Québec, 2007.
« Une pensée machiavélienne de la liberté au XXe siècle : Hannah Arendt et l’histoire », dans C. Nadeau et A. Lapointe (dir.), La philosophie de l’histoire. Hommages à Maurice Lagueux, Québec, Presses de l’Université Laval, « Zêtêsis », 2007, pp. 319-347.
« La France et le pluralisme constituant », dans V. Bourdeau et R. Merrill (dir.), La République et ses démons – Essais de républicanisme appliqué, Paris, Éditions ère, 2007, ch. 5, pp. 108-120.
« Le républicanisme comme anticontractualisme : Machiavel, Rousseau et Pettit », dans Ludovic Chevalier (dir.), Les méthodes en philosophie politique, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2006, pp. 139-154.
« Le primat de la légitimité politique : une conception politique du constitutionnalisme pour l’intégration européenne », dans J. Couture et S. Courtois (dir.), Regards philosophiques sur la mondialisation, Presses de l’Université du Québec, 2005, pp. 209-226.